
Le développement du langage et la prononciation, n’est-ce pas un sujet de discussion populaire chez les parents qui ont un petit entre 2 et 5 ans ? Étant orthophoniste, je trouve que le sujet revient très souvent oui, même chez les parents qui ont un enfant qui se développe très bien dans cette sphère. La raison de leur inquiétude est simple, il arrive que l’enfant transforme ou omet des sons lorsqu’il parle.
Donc dois-je m’inquiéter sur la prononciation de mon enfant?
Des fois il y a matière à s’inquiéter, d’autres fois non. On ne peut pas s’en vouloir de toujours vouloir le bien pour son enfant, mais on peut aussi se rassurer en sachant que :
C’est normal que notre enfant fasse des erreurs de prononciation, même jusqu’à 5 ans.
Il existe des sons plus difficiles que d’autres à produire et des positions dans le mot plus ardues. En effet, l’acquisition est graduelle. Les derniers à être acquis sont les sons « ch » et le « j » parce que leur placement est très précis. L’important est que votre enfant arrive à se faire comprendre et qu’il ne soit pas frustré lorsqu’il s’exprime.
C’est normal que jusqu’à un certain âge, certaines personnes n’arrivent pas à le comprendre en tout temps.
On devrait s’inquiéter si un inconnu ne comprend pas l’enfant à 4 ans (Beauséjour, 2018). Dans ce cas, n’hésitez pas à rencontrer un orthophoniste!
Vous vous dites peut-être que vous n’êtes pas inquiets pour sa prononciation, mais que vous aimeriez aider votre enfant à prononcer mieux certains sons. Alors comment faire ?
À ne pas faire : Devenir la police de la diction!
Ce n’est plaisant ni pour le parent, ni pour l’enfant. Ce n’est pas naturel dans une conversation de se faire reprendre. Cela peut nuire au plaisir de parler, qui est essentiel pour toute la vie, nuire à l’estime de l’enfant et même atteindre la relation parent-enfant.
À privilégier : Donner des modèles!
On le sait bien, les parents sont des modèles pour leur enfant. C’est vrai aussi pour s’améliorer sur le plan de la prononciation. C’est naturel et cela ne nuit pas à l’interaction.
Qu’est-ce que ça veut dire « donner des modèles »?
Lorsque mon enfant fait une erreur de prononciation, je lui redonne un modèle de la bonne prononciation, sans l’obliger à répéter. Aussi simple que ça! Naturel, efficace. L’enfant répète s’il a envie (certains n’en ont pas besoin pour bien le produire, d’autres ont besoin de plus de modèles pour l’essayer). On peut le faire de plusieurs manières :
- En donnant un modèle direct : ex. il pourrait dire « oh il est beau le sssa », vous pouvez dire « oui très beau le CHat » ;
- En donnant un choix : ex. « tu parles d’un chien ou d’un CHat? » ;
- En posant une question : ex. « tu parles du CHat caramel? ».
Parfois, on peut aussi rendre le modèle encore plus efficace, bien qu’on nuise au côté naturel de la stratégie. Pour rendre le modèle plus accessible pour votre enfant, vous pouvez :
- Exagérer le son ou l’allonger : ex. « oui quel beau CHHHHat »;
- L’encourager à regarder votre bouche pour voir la production : en pointant votre bouche en même temps que vous donnez le modèle, ou en le disant explicitement « tu peux regarder ma bouche, je ne fais pas le son pareil moi, CHHHat »;
- Ajouter des gestes qui aident à comprendre la différence de production : s’il fait le son « s » pour « ch », vous pouvez utiliser l’analogie du serpent en comparaison à celle du silence « quand on dit « Salade » c’est le serpent, mais quand on dit « Chat » c’est comme quand on fait chut ».
Il faut se souvenir qu’il faut que l’enfant réalise qu’il prononce différemment, sans toutefois le faire sentir qu’il n’est pas bon, et surtout qu’il puisse évoluer à son rythme. Vous ne pourrez pas non plus le faire 24h sur 24, à vous de choisir quelques moments du quotidien adaptés : durant le bain, à table, etc.
L’important, c’est quoi?
N’oubliez-pas non plus que le but n’est pas d’avoir une diction parfaite. Tout le monde a son accent, ses erreurs bien à lui, même les orthophonistes. L’important, c’est d’être fonctionnel et d’avoir du plaisir à parler.
N’oubliez pas que, parfois, c’est au parent de revoir ses attentes. Oui, on veut l’aider, mais on veut surtout qu’il conserve son plaisir à parler!
Sara Théberge, Orthophoniste
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Référence :
Beauséjour, V (2018). Développement du langage signaux d’alarme : Quand aller consulter au CLSC. Repéré à : http://www.agirtot.org/media/489605/6-signaux-d-alarme.pdf
Excellent article, très intéressant.
Merci
Très heureuse que l’article vous soit utile 🙂